Journal juin 2021

Chronique d’antan P A G E 2 6 J U I N 2 0 2 1 N ° 1 0 Les assemblées du désert en forêt de Montagnol C'est dans la forêt de Montagnol, l'une des plus grandes du secteur, qu’en pleine solitude, on se réunissait. Pendant plusieurs années, ce lieu fut une terre sacrée pour les protestants chassés de leur lieu de culte et, ce, jusqu'en 1748. « Au jour dit, à la tombée de la nuit, en silence, la famille quitte sa maison par une porte dérobée et se met en marche, bien- tôt rejointe par ceux des métairies voisines ou des hameaux traversés. » Sur le haut de la forêt, à la source qui ali- mente le hameau de la Roussié, nous som- mes à la Font de la Clède, lieu retiré et très propice de par sa forme incurvée où le pré- dicant pouvait parler et être entendu de tous. Plusieurs réunions s’y sont déroulées. A la Font de la Clède, le 8 novembre 1744, on comptait 223 chevaux et de 4 000 à 6 000 nouveaux convertis ; au Rec de l’En- guillou, le 17 janvier 1745, 2 000 calvinis- tes. (Source : « Les Assemblées du Désert » de Maurice de Poitevin). Autour de la forêt, on se réunissait aussi. Le 7 mars 1745, au Ruisseau de L'Enguial- lou près de la Daureillée, l'assemblée fut troublée par la neige et la pluie et pour- tant, il y avait 6 000 personnes. Les fidèles avaient apporté de la paille pour se mettre à genoux ; ailleurs, on allumait de grand feux pour se réchauffer. On y venait parfois de loin. Ce jour-là, il y avait 150 chevaux attachés. C'est à la Daureillée que le prédicant Cor- bière de la Picardié (La Sicardié) trouvait gîte et repos, dans la jasse située le long du chemin qui monte vers l'Arenas. Les famil- les Bonifas et Mialhe, très croyantes, ap- portaient le couvert. Son ami Noé Mialhe lui offrait le gîte. Depuis trois siècles, ces familles qui habitaient le lieu, étaient connues pour leur dévouement ; ils don- naient du lait aux enfants qu'on portait à baptiser par tous les temps, et, au prin- temps, offraient des fleurs aux jeunes fian- cés qui allaient faire bénir leur union au Désert. Ils payèrent cher leurs implications. Une assemblée fût surprise le 21 janvier 1689 par les dragons du roi. Bonifas Abel 60 ans laboureur, sa femme 35 ans, François 20 ans et Marthe 18 ans, leurs enfants ainsi que le valet 65 ans furent emmenés à la Tour Caudière à Castres et jugés. Des sévi- ces et de lourdes amendes leurs furent in- fligés, de même qu’à la famil- le Mialhe. C'est de là aussi que partit le prédicant Corbière de la Picardié (La Sicardié), avant d'être pris et tué au lieu-dit « La Pierre Plantée ». Ce n'est qu'en 1787 que Louis XVI accordera aux pro- testants le bénéfice d'un état civil, première étape de re- connaissance avant celle de la liberté de conscience et de culte. A Sablayrolles, l'ancien temple porte en- core visible sur son linteau la mention « Maison d'Oraison ». De nombreuses assemblées se sont dé- roulées également à Ferrières, Le Carla, Espérausses, Viane, Lacaze à Saint Jean del Frech et son tristement célèbre massacre et bien d'autres endroits encore qu'il serait trop long de citer ici. Font de la Clède